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HENRIETTE AYMER DE LA CHEVALERIE

Fondatrice de la Congr�gation

Le 23 novembre, les religieux et religieuses des Sacr�s-C�urs (Picpus) rendent un hommage � leur fondatrice, la Servante de Dieu, Henriette Aymer.

La biographie de notre Fondatrice, dans son d�roulement chronologique, nous est bien connue.
Nous pouvons puiser � plusieurs sources pour nous souvenir. Par contre, sa personnalit� n'a pas �t� �tudi�e avec la profondeur qu'exigerait l'importance du r�le qu'elle a jou� dans la Congr�gation. Mais cela demanderait un travail consid�rable et des personnes capables de le r�aliser.

Par ce bref r�sum�, je cherche seulement � attirer l'attention sur son itin�raire spirituel en prenant comme jalons quelques points cl�s de sa vie.

Sa premi�re exp�rience de l'amour donn� et re�u

Il est commun�ment admis que les impressions �prouv�es pendant l'enfance marquent une vie. Le premier pas, vers la personnalit� affectivement m�re, est fait lorsque l'enfant ouvre les yeux � la vie dans un milieu familial chaleureux, o� il se sent accept� et choy�.
En 1767, Henriette Aymer de la Chevalerie na�t au petit ch�teau des Aymer, et c'est la qu'elle vit cette premi�re exp�rience. Nous avons peu de d�tails concernant ses premi�res ann�es, mais ils suffisent � nous prouver que, � la base de sa personnalit�, se situe une enfance heureuse, seule fille entre deux fr�res, dans une famille unie et chaleureuse. Le temps pass� � l'Abbaye de Ste Croix de Poitiers, pour mieux pr�parer sa premi�re communion, lui offre l'exp�rience de pri�re personnelle et liturgique et, peut-�tre, �veille-t-il en elle l'attrait pour la musique sacr�e. Nous savons par une lettre de M. Br�mond, son parent, qu'� � l'Abbaye, Henriette fut aussi tr�s aim�e. Il �crit "Henriette est pleine d'esprit, r�ussit tout ce qu'elle entreprend. Elle est g�n�ralement aim�e de toute la communaut�, mais, d�une mani�re sp�ciale de Madame l'Abbesse".

A onze ans, sa premi�re grande peine est la mort de son p�re. Sans doute, � partir de cette date, devient-elle davantage pour sa m�re un appui et une amie, d'autant plus que son fr�re a�n�, Louis, est absent, (page de Louis XVI depuis l'adolescence). Madame Aymer se charge de faire pr�parer sa fille � une vie de relations sociales, vie brillante et superficielle � laquelle Henriette semble �tre destin�e. Toujours latent, et en apparence oubli�, subsiste en elle le germe de sensibilit� spirituelle que lui a laiss� son premier contact avec Dieu, � l�Abbaye de Ste Croix.

L'horizon historique

Vont suivre quelques ann�es o�, tandis que la France approche de la convulsion politique et sociale, la jeunesse d'Henriette fleurit � Poitiers o� elle et sa m�re se sont fix�es. Les voil� au milieu d'une noblesse qui veut ignorer les difficult�s et continue � jouir de la vie, sans aucun id�al s�rieux. Quel jugement Henriette porte-t-elle sur cette soci�t� ? Quelques personnes nous disent ce qu'elle en pense : "J'ai connu le p�re de M. Turquant", �crira-t-elle des ann�es plus tard. "C'�tait un �vive-la-Vierge� qui passait pour un homme honn�te et il ne faisait presque rien dans sa profession de procurateur". Selon Hilarion Lucas, elle va aux f�tes pour faire plaisir � sa m�re. Cependant, elle y brille par ses qualit�s et son talent musical. Ce fait rendra difficile, plus tard, son admission dans la "Soci�t� du Sacr� Coeur" et Henriette elle-m�me y fera allusion lorsqu'elle parlera des "�garements de sa jeunesse".

Tout ce qui l'entoure, � son �poque, forge sa personnalit�. Le monde est dans l'attente des grandes avanc�es. La machine � vapeur a �t� d�couverte ; on pressent l'�lectricit�. Les d�couvertes scientifiques semblent augurer d'un avenir plein de promesses. On ne parle que de progr�s. Les distances sont raccourcies. Son propre fr�re, Dominique, part pour la Guadeloupe. On vit la crise d'une �re historique qui s'ach�ve. Tout cela ouvre l'esprit d'Henriette. Pour elle, la mer ne sera pas un obstacle quand ses Fr�res et Soeurs des ss.cc envisageront de la traverser pour "embraser" le monde.

L'exp�rience du manque d'amour

Mais il y a autre chose que les progr�s scientifiques. Les tensions sociales provoquent l'explosion et la France "s'enflamme" de toute part. Ce qui a commenc� comme une r�volution bourgeoise se retourne surtout contre l'Eglise et la noblesse. A Poitiers, on entend d'abord les �chos de Paris, puis on passe aux faits. Au domicile m�me des Aymer, m�re et fille subissent la pers�cution et sont conduites en prison. Henriette vit son premier contact avec la violence et la destruction, et elle la vit en profondeur.

Fabio Ciardi, dans son livre "Les fondateurs, hommes de l�Esprit" affirme que tous les fondateurs, dans la gen�se de leurs �uvres respectives, passent par une �tape d'approfondissement o� ils per�oivent la lumi�re de Dieu dans ce que lui (Ciardi) appelle "Sources d'inspiration indirecte" (circonstances personnelles, contexte de vie...) ou "directe" (lumi�re int�rieure, moments forts de pri�re...). Pour Henriette, cette �tape se pr�sente aussi en deux �tapes: l'une de d�sert, dans la prison o�, au travers des dures conditions de vie et le contact avec la violence, elle se retrouve face � elle-m�me et se situe aussi face � Dieu. L'autre �tape est celle de la contemplation dont nous parlerons plus loin.

█ 1�re Etape : L�Illumination

Dans l'�tape de d�sert appara�t clairement un trait essentiel de la personnalit� d'Henriette: sa capacit� d'int�riorisation, sa profondeur que la vie facile � Poitiers avait peut-�tre endormie.

C�est l'heure de la conversion totale, l'heure critique par laquelle sont pass�es toutes les grandes figures de L'Eglise et qui a �t� d�cisive pour l'avenir. Th�r�se d'Avila relate, dans les livres 7 et 8 de sa "Vie", une exp�rience identique. Apr�s une profonde crise provoqu�e en partie par la situation de son couvent, elle reste fid�le � la pri�re et sort de la crise avec la d�cision "de ne rien refuser � Dieu". Ressemblance notable avec Henriette qui emploie les m�mes termes le jour o� un jeune pr�tre arrive � la prison pour offrir aux prisonni�res le sacrement de p�nitence. "Si je me confesse, ce sera avec la promesse de ne rien refuser � Dieu, � l�avenir".

Dans la mesure o� cela d�pend d'elle, elle r�pand l'Amour autour d'elle: sa propre m�re, la fille du ge�lier, la femme marginalis�e par les autres d�tenues... C�est le germe de ce qui sera son appel � la R�paration, sa fa�on de r�pondre � une situation qu'elle per�oit comme contraire au plan de Dieu. Probablement n'a-t-elle pas lu beaucoup de livres de spiritualit�, mais son intuition la fait penser � un Dieu qui, par-dessus tout, aime et veut �tre aim�. Henriette est morte, � la vie facile et superficielle. Quand elle sort de prison � 28 ans, elle a m�ri ; elle est devenue la femme forte, tendue vers un id�al. Face � la violence, � la haine, � la destruction, il est urgent de r�tablir le r�gne de l'amour.

█ 2�me Etape : contempler l'amour

Pendant ce temps � Poitiers, un personnage est devenu fameux. C'est, � la fois, un pr�tre z�l� et l'aventurier "Marche-�-terre" ou "J�r�me". C�est l'abb� Coudrin de qui un auteur a affirm�: "Elles pourraient se multiplier � l�infini ces histoires se rapportant, en m�me temps � la l�gende dor�e et aux romans policiers. Coudrin fut le premier h�ros, le plus actif in�branlablement fid�le au culte proscrit... Il est certain que nulle victime de la guillotine n�avait jou� un r�le aussi important que Coudrin et cependant il ne mourut qu�en 1837". Henriette trouve en lui le guide qu'elle cherche. "Ce pr�tre, dit-elle � une amie, parle comme je prie". Son aide et ses contacts avec la "Soci�t� du Sacr� Coeur" lui font d�couvrir un nouveau chemin. Et sur les fondements de sa propre personnalit�, m�rie par tous les �v�nements v�cus, d�bute la seconde �tape qui sera d�cisive dans la vie : la contemplation. "Quand vous avez �tabli l'adoration et que vous m�avez donn� une heure, sans vous en douter, vous avez fix� ma destin�e", �crit-elle au P�re Coudrin.

A partir de l�, le Tabernacle dissimul� dans les lambris du salon devient "l�Etoile", le guide de la vie d'Henriette. C'est le d�but d'une relation toute sp�ciale entre elle et l'Abb� Coudrin: Il est son vrai directeur, son accompagnateur. Elle le ressent bien ainsi. Mais dans ce monde o� il est si difficile de comprendre l'exp�rience mystique, Henriette voit clairement le chemin que Dieu lui trace pour sa Congr�gation. Et malgr� sa r�pugnance � le d�voiler, elle comprend que le Seigneur veut qu'elle en parle. On pourrait dire que, si elle se consid�re comme disciple du P�re Coudrin, si elle le v�n�re profond�ment et soumet � son jugement tout ce qui la concerne pour ce qui touche � la marche de la Congr�gation, c'est fr�quemment lui qui se laisse guider par ce qu'elle lui transmet. Entre autres, il la prie de demander au Seigneur telle ou telle chose. Dans les communications qu'elle lui �crit, Henriette parvient � lui dire quel est le rythme de pri�re et de travail que Dieu veut pour lui. Dans les "billets" d'Henriette, des paragraphes entiers sont des documents de Congr�gation.

Vu l'activit� pastorale du P�re comme pr�tre ou comme vicaire dans les divers dioc�ses, le gouvernement de l'Oeuvre est parfaitement r�parti entre les deux Fondateurs. La "Bonne M�re" est un �l�ment si fondamental que le Fondateur peut �crire "Elle est la lumi�re et moi seulement le chandelier qui la soutient". Ou encore: "Elle est la racine de l�arbre, si on l�arrache, on le prive de vie...". "Elle est plus �Fondateur � que �Fondatrice�." " Elle est l��me des deux familles".

Vivre et annoncer l'amour


S'il fallait choisir un seul trait de la personnalit� d'Henriette Aymer, on opterait, sans doute, pour son aptitude � aimer. Aimer Dieu passionn�ment mais aussi aimer tous ceux qui l'approchent. Une aptitude et une attitude qui lui ont m�rit� le nom caract�ristique de "Bonne M�re". Il est clair que l'exp�rience de la haine, de la violence, de la destruction qu'elle a v�cue, r�veille en elle l'urgence de la R�paration; il faut reconstruire le Royaume et pour cela, il est indispensable de mettre, dans ce monde d�truit, l'amour qu'elle a contempl� dans le C�ur de J�sus.

Les personnes de son entourage � qui elle t�moigne cet amour forment une longue liste multiforme: ses relations familiales d'abord, puis les S�urs et les Fr�res ss.cc et les fillettes �lev�es dans les diff�rentes maisons, qui se pressent autour d'elle en qu�te d'une aide, d'un appui ou d'un conseil. Il est impressionnant le contraste entre sa vie personnelle de p�nitence et d'aust�rit�, v�ritablement hors du commun, et la compr�hension, la gentillesse et les d�tails minutieux dans sa fa�on d'aborder et de traiter les autres. Ceux qui ont v�cu avec elle l'attestent: "il ne pourra jamais y avoir dans d'autres communaut�s la vie dont nous jouissons pr�s de la �Bonne M�re�", �crit S�ur Gabriel de La Barre. Les t�moignages pourraient se multiplier.

On peut voir dans les lettres de la Fondatrice une insistance constante pour la priorit� de l'Amour. "Dans votre communaut�, vous �tes tr�s observantes mais un peu grognons. Ici, nous sommes tr�s superficielles, un peu �tourdies, mais nous sommes joyeuses et nous nous aimons". C'est aussi le fondement de sa p�dagogie: "Que les enfants se sentent aim�es, stimul�es", en r�sum�: "qu'elles soient heureuses avec nous". Et avec cette m�me attitude, elle essaie d'aider de ses conseils ou, bien au moyen d'un don si elle peut et toujours avec affection, quiconque a recours � elle.

Elle ne peut laisser tr�s longtemps hors de son z�le � transmettre l'Amour, les habitants des "�les lointaines" que le Bon P�re avait per�u dans le grenier de La Motte comme b�n�ficiaires de l'action missionnaire. Avec ardeur, Henriette collabore � la pr�paration du voyage des premiers missionnaires, mais elle ne verra pas le d�part des Soeurs, qui, plus tard, traverseront les mers pour porter le message ou donner leur vie, comme le groupe embarqu� sur le "Marie Joseph".

Les Missions, c'est le "but" qui occupe et pr�occupe Henriette tout au long de ses ann�es d'activit� comme Fondatrice de Communaut�. Elle est Sup�rieure G�n�rale, �ducatrice et, en m�me temps, contemplative. Elle ouvre 17 maisons en France. Dans une tr�s grande p�nurie �conomique, elle g�re, administre; elle est la "m�re de famille" des deux branches. Elle parvient � recevoir quelques centaines de S�urs, en voit mourir plus de deux cents, parmi elles son amie et confidente S�ur Gabriel de La Barre. Dans ses Communaut�s, sont instruites, �lev�es des centaines de fillettes, pauvres de pr�f�rence, et bien des familles sont secourues. Tous sentent l'appui et la s�curit� de cette petite femme, accueillante, joyeuse, imaginative qui sait si bien cr�er autour d'elle une ambiance de cordialit�; un centre d'union, le c�ur, pourrait-on dire, de la grande famille ss.cc qui, rapidement, s'est constitu�e.

En somme, avec ses propres qualit�s humaines, le soutien de la contemplation et toujours la conscience de l'urgence de reconstruire le Royaume, Henriette devient l'annonce de l'Amour du Dieu vivant.

Jusqu'� se consumer comme un cierge

L'usure d'une vie dure comme la sienne a raison de la sant� d'Henriette. En d�cembre 1829, elle tombe foudroy�e par une attaque d'apoplexie. Elle a 61 ans. Bien qu'elle se remette un peu, l'h�mipl�gie qui paralyse le c�t� droit de son corps, l'emp�che de reprendre totalement ses activit�s. De sa chambre, elle continue � �tre l'�me de l'Oeuvre, y compris en 1830 lorsque la maison de Picpus subit l'irruption des troupes r�volutionnaires, Cons�quence de la situation de la France � l'abdication de Charles X et de son dauphin, et de la mont�e sur le tr�ne du duc d'Orl�ans sous le nom de Louis-Philippe).

Certains s'�tonnent, aujourd'hui, que la v�n�ration pour la Fondatrice l�ait maintenue pendant sa maladie comme centre des d�cisions � prendre. D'autres pensent que, gr�ce � elle, l'unit� de la Congr�gation a �t� pr�serv�e. Quoi qu'il en soit, son attitude personnelle pendant les cinq ann�es d'infirmit� est la r�alisation du projet qu'elle exprima le jour de sa cons�cration aux Sacr�s C�urs "au service desquels je d�sire me consumer comme ce cierge". Patiente, avec son habituel sourire, elle vit le don dans la maladie comme elle l'a v�cu en pleine activit�.

Le 23 novembre 1834, la "Petite Paix" (comme l'appelait le Fondateur) entre pour toujours dans la Grande Paix, apr�s avoir parcouru l'itin�raire d'une vie bien remplie. Elle laisse l'Oeuvre en marche. Cette Oeuvre qu'elle a fond�e et maintenue avec la conviction qu'elle �tait - et nous croyons qu'elle continue � �tre � "une n�cessit� pour le Coeur de Dieu".


█ Maria Cruz Pereda ss.cc
█ in �Un charisme dans l�Eglise� (Rome, 2001)








PRIER POUR LA CANONISATION DE LA BONNE MERE

Dieu notre P�re,
dans Ta grande bont� et Ta mis�ricorde,
Tu as appel� Henriette � �tre t�moin de Ton Amour
r�v�l� dans les C�urs de J�sus et de Marie.

En adoration devant le Saint Sacrement,
elle a r�alis� le besoin de contempler, de vivre
et de proclamer Ton Amour
dans un monde bris� par la violence et la division.

Avec Pierre Coudrin, elle a fond�
la Congr�gation des Sacr�s C�urs de J�sus et de Marie
et de l�Adoration perp�tuelle
pour continuer cette mission
toujours et partout.

Par son intercession,
obtiens-nous la faveur que nous Te demandons
(nommer la demande).

En Ta grande bont�, fais que l��glise
reconnaisse bient�t en elle
une authentique t�moin de l��vangile.

Nous Te le demandons par J�sus-Christ Ton Fils.
Amen !





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