RECHERCHER
Accédez à la médiathèque de RESSOURCES


Pages : « Début   ‹ Précédente | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 |

Premier dimanche de l'Avent

Chronologiquement, l'Avent est la période de quatre semaines qui précède la célébration de la Nativité de Jésus. Ce temps n'est pas, si nous regardons son contenu chrétien, uniquement un temps de "préparation à Noël".

Il vaudrait mieux de le décrire comme le temps destiné à cultiver l'espérance en tant que cela est une condition inextirpable de l'existence chrétienne.
C'est un temps très riche, très complexe, qui donne beaucoup à réfléchir et qui, dans sa liturgie, nous offre des textes bibliques très beaux et saisissants.

Par disgrâce, se présentent à nous quelques obstacles inéluctables nous empêchant ainsi de vivre pleinement ce temps et de lui donner toute sa saveur:
Excepté les inévitables préoccupations inhérentes pour les cadeaux et les vœux, il y a le chevauchement de l'Avent avec le Mois de Marie (qui est le temps le plus marqué dans la religiosité au Chili); la fin de l'année académique surchargée (pour les professeurs et les élèves avec les examens et les épreuves décisives); la saturation publicitaire qui inonde les valeurs et les signes de la célébration de Noël. Nous devons aussi veillez deux écueils, celui de tomber dans le folklorique, d'une part, en vidant cette période de son contenu proprement chrétien, et, d'autre part, de noyer la générosité et la solidarité dans un consumérisme effréné.

Cela dit, je vous invite à réfléchir brièvement sur l'espérance inhérente à la foi chrétienne... L'espérance a quelque chose à voir avec notre futur, évidemment. Mais, est-il possible d'espérer quelque chose du futur? Y-a-t-il un futur qui ne soit pas appelé à se convertir en passé? Dans quelle mesure pouvons-nous constituer notre futur? Allons-nous, nous-mêmes, vers notre futur ou, est-ce notre futur qui vient à nous? Ces questions, et celles qui leurs ressemblent, ont toujours tourmenté l'esprit des hommes. Elles constituent le socle où émerge l'espérance chrétienne avec sa particularité spécifique. Le futur de cette espérance est situé dans l'éternité, dans le temps de Dieu. Ce que nous espérons, c'est entrer dans la communion définitive avec Dieu dans laquelle l'existence n'est ni soumise à l'avenir, ni condamnée à se convertir en passé.

Notre foi au Dieu d'Amour nous invite à la communion éternelle avec lui. Elle nous pousse à prendre des décisions qui nous conduisent à cette rencontre définitive. Mais, en même temps, elle nous fait reconnaître ce Dieu qui vient à nos vies à travers les rencontres et les événements imprévus. Celles-ci deviennent alors beaucoup plus importantes pour la configuration de notre existence que les projets que nous traçons nous-mêmes. De plus, si nous n'avons pas avant quelques avant-goûts, même anticipés et partiels, du merveilleux qu'est la communion avec Dieu, cela nous deviendrait impossible d'espérer et de désirer ce futur de communion éternelle avec Dieu. Nous ne pourrions pas chercher Dieu, si Dieu lui-même n'était pas venu à notre rencontre dans notre histoire.
Il nous est difficile de percevoir la richesse insondable qui s'est donnée dans l'existence historique de Jésus. Cependant, nous pouvons synthétiser notre espérance en "être toujours avec lui". Cette histoire, qui commença à partir de Bethléem, nous pousse à espérer et à désirer la rencontre définitive avec lui, à ne mettre notre espérance qu'en lui seul.

L'espérance chrétienne naît uniquement de notre foi en ce Dieu qui nous aime, et ne peut se transmettre si elle n'est pas animée par l'amour de lui et par le désir de la communion éternel avec lui. Une espérance sans désir n'est pas une espérance.

Au sujet des textes:
- Première lecture: Is 2, 1-5

Isaïe souligne que la communion avec Dieu se traduit par la Paix universelle en dépassant le besoin et la recherche du pouvoir et de la domination, en franchissant les barrières qui nous maintiennent séparés et distants.

- Deuxième lecture: Rm 13, 11-14

Saint Paul nous avertit que la "venue prochaine du Salut" (cf. la "venue du Règne de Dieu" dans le message de Jésus) doit se voir dans la nature et le caractère de nos œuvres avec transparence et cohérence.

- Evangile: Mt 24, 37-44
Jésus met en valeur la "venue de Dieu". Celle-ci revêt un caractère de "Justice", une Justice qui est salvatrice pour ceux qui ont vécu dans "l'espérance du Seigneur" et qui condamne ceux qui ont vécu à la dérive et sont préoccupés par des critères immédiats, par rien de plus que de boire, manger et se marier.

Suggestions de Vie:

1) Vivre ouvert à ce "Dieu plus grand que soi", à son amour, à son futur, et aussi à sa justice. ("Accepter que notre condamnation soit le commencement de notre salut" S. Augustin).

2) Reconnaître que la condition indispensable de l'espérance est de ne pas s'installer, la non-satisfaction de notre présent, la conscience de précarité, de limites, de ne pas vivre en plénitude.

3) Nous demander si nous avons vraiment faim et soif de Dieu. Dieu est présent quand nous souffrons de son absence, quand nous sommes nostalgique de lui.

par Beltran Villegas ss.cc (Chili)
in "Esquemas para Homilias" Conférencia Episcopal de Chile (2005)

® Illustration: peinture de Berna Lopez.

www.evangile-et-peinture.org



Le Christ Roi, le Sacré-Coeur et l'intronisation

Ce dimanche, 25 novembre, nous fêtons le "Christ Roi", avant d'entrer, dans le temps de l'Avent.
L'article qui suit, du Père Bocquet ss.cc, écrit dans les années soixante-dix, dans un langage de l'époque, a le mérite de nous donner à penser et à méditer sur cette fête. Il fait aussi le lien entre la figure du Christ Roi, le Sacré-Coeur et l'Intronisation, l'oeuvre du Père Matéo:

Il y a une grande affinité entre les deux fêtes du Sacré-Cœur et du Christ-Roi. L'idée de royauté complète heureusement et, en un certain sens, redresse l'idée que nous devons nous faire du Sacré-Coeur. Tel est l'enseignement de la Bible, de la Liturgie, des Papes; telle est aussi la conclusion qui se dégage de l'histoire et de la pratique de l'Intronisation.

Dans la Bible et dans la Liturgie

Quatre fêtes honorent la royauté de Jésus et jalonnent pour ainsi dire, trimestre par trimestre, l'année liturgique. A tour de rôle elles proposent à notre méditation les quatre titres de Jésus à la royauté universelle.

L'Epiphanie nous rappelle qu'il est Roi par droit de naissance. "Il est, nous dit saint Paul, l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature, car c'est en lui qu'ont été créées toutes choses dans les cieux et sur la terre. Il est avant toutes choses et tout existe en lui. Il est la tête du corps, c'est-à-dire de l'Eglise." (Col 1,15). C'est pourquoi l'Ange Gabriel annonce à Marie que le Fils qu'elle enfantera sera grand. On l'appellera le Fils du Très-Haut. Il règnera sur la maison de Jacob à jamais et son règne n'aura pas de fin (Lc 1,31).

Les Rameaux nous enseignent que Jésus est Roi par droit de conquête, car le Fils de l'Homme a donné sa vie pour rançon d'une multitude (Mc 10,25). Nous avons été rachetés au prix fort (1Co 6,20), nous sommes ainsi devenus son bien, sa possession, son royaume. Aussi parce qu'il s'est fait obéissant jusqu'à la mort et à la mort sur une croix, Dieu l'a-t-il exalté et lui a-t-il donné le Nom, qui est au-dessus de tout nom, pour que tout au Nom de Jésus s'agenouille, au plus haut des cieux, sur la terre et dans les enfers, et que toute langue proclame de Jésus-Christ qu'il est Seigneur à la gloire de Dieu le Père.

Le Sacré-Cœur nous donne l'explication, la seule satisfaisante, de l'Incarnation et de la Rédemption: Ayant aimé les siens, il les aima jusqu'à l'excès (Jn 13,1). En ceci s'est manifesté l'amour de Dieu pour nous: Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui. En ceci encore consiste son amour: Ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c'est lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés. Et nous, nous avons reconnu l'amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru (Jn 4,9; 10,16). L'amour est de plus le lien puissant qui nous unit à lui et affermit son règne en nous. Saint Jean poursuit en effet: Dieu est amour: celui qui demeure dans l'amour demeure en Dieu et Dieu demeure en Lui (Jn 4,16). Il est Roi par son Cœur.

La Fête du Christ-Roi qui nous presse de proclamer: Qu'il soit Roi par notre libre choix, est comme le résumé et le complément des trois autres fêtes. Puisque le Christ possède de tels titres à la royauté, comment lui refuser le seul titre que nous puissions lui offrir: être Roi par nos acclamations? Il pourrait nous imposer sa domination. Il ne le veut pas. Car sa royauté est avant tout une royauté d'amour et, sans liberté, l'amour n'existe pas. D'ailleurs de gré ou de force, il faut se soumettre à son empire. Ceux qui refusent son amour n'échappent pas à sa justice: au lieu du ciel, c'est l'enfer qui les attend.

L'office et la messe du Christ-Roi sont des chefs-d'œuvre et témoignent contre ceux qui parfois affirment, à la légère, que l'Eglise d'aujourd'hui a perdu le sens de la liturgie et de la beauté. Au reste, en fait de textes sacrés, il n'y avait que l'embarras du choix, tant la royauté du Christ est une idée qui domine la Bible.

Elle inspire les Psaumes: "C'est moi qui t'ai sacré Roi sur Sion, ma sainte montagne. Demande et je te donne les nations pour héritage, pour domaine les extrémités de la terre" (Ps 2). "Ouvrez-vous, portes éternelles: qu'il entre le Roi de gloire ! Qui est ce Roi de gloire ? C'est lui, le Dieu des armées, c'est lui le roi de gloire" (Ps. 23). "Tous les peuples, battez des mains. Acclamez Dieu en éclats de joie. Il est roi par toute la terre. Sonnez pour Dieu de tout votre art. Dieu, il règne sur les païens, il siège sur son trône de sainteté" (Ps 46).

L'Apocalypse, le dernier livre de la Bible, chante le triomphe final du Christ sur les ennemis de Dieu. "Jésus-Christ est le témoin fidèle, le premier-né d'entre les morts, le Prince des rois de la terre. Il nous aime et nous a lavés de nos péchés par son sang. Il a fait de nous une royauté de prêtres pour son Dieu et Père: à lui donc la gloire et la puissance pour les siècles des siècles" (Ap 1,5). "Car l'Agneau égorgé est digne de recevoir la puissance, la richesse, la sagesse, la force, l'honneur, la gloire et la louange."

Ainsi l'année liturgique, qui nous apparaît comme rythmée à chaque saison par une fête de la royauté du Christ, se clôt-elle magnifiquement par les deux Fêtes du Christ-Roi et de la Toussaint, qui chantent le triomphe du Christ et de son oeuvre. Mais avant de célébrer la victoire des chrétiens, qui se voient récompensés de leur fidélité, c'est une initiative heureuse de fêter la victoire du Christ, "couronne de tous les saints," comme disent les Litanies du Sacré-Coeur.

L'Enseignement des Papes

Il est remarquable que les trois grands Papes qui ont écrit une encyclique sur le Sacré-Cœur aient en même temps fortement insisté sur la royauté du Christ.

Léon XIII, à l'occasion du dix-neuvième centenaire de la Rédemption, consacre le genre humain au Sacré-Cœur et pour que chacun, évêque, prêtre, fidèle puisse s'associer à son geste, il compose lui-même l'acte de consécration, dont l'idée centrale est que Jésus est Roi par son Coeurs: « Très doux Jésus, Rédempteur du genre humain... nous sommes à vous, nous voulons être à vous et afin de vous être étroitement unis, voici qu'en ce jour chacun de nous se consacre spontanément à votre Sacré-Cœur... Soyez le Roi non seulement des fidèles qui ne se sont jamais éloignés de vous, mais aussi des enfants prodigues qui vous ont abandonné... Soyez le Roi de ceux qui vivent dans l'erreur ou que la discorde a séparé de vous."

Pie XI, le Pape de l'Action catholique, a été, on l'oublie trop, le Pape du Christ-Roi et le Pape du Sacré-Cœur. Il a composé pour le Sacré-Cœur une messe et un office entièrement nouveaux. Il en a fait une des sept grandes fêtes de l'année et l'a mise sur le même pied que Noël et l'Ascension. Il a publié en 1928 l'encyclique Miserentissimus Redemptor où il insiste plus particulièrement sur la Réparation, à laquelle il a voulu donner une base théologique.
Or, dans son encyclique, il rappelle la consécration du genre humain au Sacré-Cœur par Léon XIII. Il dit explicitement, que s'il a institué trois ans plus tôt, en 1925, la Fête du Christ-Roi, c'est pour prolonger le geste de Léon XIII et permettre de le renouveler chaque année. Et afin de mieux affirmer le lien qui existe entre ces deux fêtes, il prescrit qu'au Christ-Roi on récitera l'acte de consécration de son prédécesseur et les Litanies du Sacré-Coeur.

Pie XII, sur un plan différent, mais parallèle, a lié lui aussi les deux idées de cœur et de royauté, puisqu'il a institué à quelques années d'intervalle les deux Fêtes du Coeur de Marie et de Marie Reine.

La doctrine et la pratique de l'Intronisation

Dans sa circulaire de 1926, le P. Matéo montre la connexion intime qui existe entre son œuvre et la Fête du Christ-Roi:

«Par l'institution de la nouvelle fête, Pie XI a consacré notre drapeau de guerre sainte, celui qui depuis 1908 préside à toutes les batailles et à toutes les victoires, comme aux épreuves et aux immolations glorieuses de la croisade de l'Intronisation. Notre oeuvre a créé partout une mentalité sociale en harmonie avec cette fête; bien plus, elle a provoqué un véritable plébiscite en faveur de cette idée."

"Depuis le début, nous nous sommes élevés contre le mal affreux du laïcisme social et politique, qui avait détrôné Jésus dans la vie familiale, sociale et nationale, le réduisant à une vie de dérision, une vie de sacristie. L'hommage familial, tel que nous le demandions, indiquait clairement un honneur royal: en réclamant pour le Sacré-Cœur la place d'honneur, nous ne faisions qu'exiger pour le Roi le trône qui lui revient de droit au foyer vraiment chrétien."

"Nous n'avons jamais songé à imposer une image officielle du Sacré-Cœur. Si nous avons montré notre préférence marquée pour le célèbre tableau, dit de Garcia Moreno, c'est qu'il est l'image du Cœur de Jésus-Roi. Elle a fait le tour du monde: elle se trouve dans les cabanes, tout comme dans les palais d'Europe et d'Amérique, prêchant, le sceptre dans une main et le globe dans l'autre, le sublime idéal de la croisade, l'oportet illum regnare, 'il faut qu'il règne' de saint Paul, l'Adveniat Regnuna Tum du Pater."

Il est remarquable que toute la prédication et l'action du P. Matéo oscille entre ces deux pôles: l'Adoration nocturne et l'Intronisation, c'est-à-dire, pour parler son langage, entre Gethsémani et le Thabor, l'agonie et la transfiguration.

Christ Vaincu ou Christ Vainqueur?

Appliqué à Jésus, le mot Roi doit être pris dans son sens le plus fort: un roi est celui qui occupe la première place et reçoit des honneurs réservés à lui seul. Il mérite ce rang et ce culte par le prestige de sa personne et les services qu'il rend. Il exerce l'autorité suprême et conduit ses sujets vers leurs destinées.

C'est en vain qu'on évoquerait pour Jésus ses titres à la royauté: droit de naissance, droit de conquête, droit d'amour, si de fait il n'est pas reconnu et traité comme un roi. Sa royauté effective que s'il se montre roi par ses succès, par ses victoires.

C'est pourquoi on a parfois reproché à la dévotion au Sacré-Coeur d'être doloriste ou victimale, c'est-à-dire de s'arrêter et se complaire dans les souffrances du Christ, au point d'oublier son triomphe. On se penche vers lui comme s'il était "un malheureux qu'il faudrait dédommager de ses échecs par une petite cour d'amis fidèles qui l'entoureraient comme font les courtisans d'un roi détrôné" (Denis, le Mystère de l'Amour divin, p.207). Cette piété trop sentimentale mériterait le reproche adressé par Jésus aux Filles de Jérusalem qu'il trouva cri pleurs sur le chemin du calvaire: "Ne pleurez pas sur moi. Pleurez plutôt sur vous! Car si on traite ainsi le bois vert, qu'adviendra-t-il du bois sec?" (Lc 23,28).

Il est certain que le culte du Sacré-Coeur oriente fortement la piété des fidèles vers la Passion, non sans profit. Il donne en effet une intelligence plus pénétrante de ce mystère. Si on cherche dans le Cœur de Jésus le motif qui lui fit accepter la Passion, on découvre que ce fut moins pour apaiser la justice divine que pour offrir une compensation à l'Amour Infini, frustré dans ses droits d'être aimé.

De soi l'amour est exigeant: de la même force dont il attire l'amour, il repousse tout ce qui n'est pas amour. Pour mesurer les exigences de l'amour divin, il suffit de se souvenir que l'amour est l'être même de Dieu. C'est au jardin de l'agonie que Jésus est mis en face des exigences de son Père: voilà pourquoi il entre en agonie, en proie à la détresse; triste jusqu'à en mourir (Mt 26,39; Lc 22,44). Il cherche un appui auprès de ses disciples. Ne le trouvant pas, son Père lui envoie un ange pour le réconforter (Lc 22,43).

La méditation de cette Passion du Coeur de Jésus a tout naturellement conduit les âmes à vouloir prendre la place des apôtres défaillants pour, comme l'ange, consoler le Sauveur. Dans son encyclique, Pie XI accepte l'expression et en donne les fondements théologiques: "Ce sont les péchés des hommes commis en n'importe quel temps, qui ont causé la mort du Fils de Dieu. Ces mêmes fautes maintenant encore causeraient sa mort, puisque chacune d'elles est sensée renouveler la passion du Seigneur, crucifiant de nouveau pour leur part le Fils de Dieu et le livrant à l'ignominie (Hb 6,6). Si on cause de nos péchés futurs mais prévus, l'âme du Christ devint triste à en mourir, elle a sans nul doute recueilli quelque consolation, prévue elle aussi de nos actes de réparation."

Quand on a ainsi pris conscience de tout ce qu'il en a coûté à l'Amour souffrant pour faire échec au péché, on passe au second degré de la réparation, qui nous est indiqué par saint Paul: "Je trouve ma joie dans les souffrances que j'endure pour vous et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son corps qui est l'Eglise" (Col 1,24). Sur ce point encore le Pape nous donne les précisions théologiques nécessaires: "La passion expiatrice du Christ se renouvelle et, d'une certaine manière, se poursuit et s'achève dans son corps mystique. Car selon saint Augustin: 'Le Christ a souffert tout ce qu'il devait souffrir; la mesure des ses souffrances est désormais comble. La dette de souffrance était donc payée par le Chef: mais elle demeurait entière pour le corps du Christ, l'Eglise'."

A son tour, Pie XII complète notre instruction: "Le divin Rédempteur veut que son Eglise naisse, pour ainsi dire, du travail même de l'Eglise. Mystère redoutable et qu'on ne médite jamais assez: le salut d'un grand nombre d'âmes dépend des prières et des mortifications volontaires, supportées à cette fin, des membres du Corps mystique" (Mystici corporis Christi).

A ce niveau la réparation n'a rien de morbide. Elle reste douloureuse, car elle est un amour sauveur, donc exigeant. Mais elle comporte aussi un côté exaltant: pensant au triomphe du Christ, saint Paul parle de joie. Ainsi le culte du Sacré-Cœur nous fait-il pénétrer au centre du mystère chrétien, pour en saisir la grandeur et y prendre une part active.

La rédemption est en même temps un acte qui s'est accompli une fois il y a vingt siècles et un appel qui se renouvelle sans cesse. Sans l'acte de Jésus mourant sur la croix il n'y aurait pas de rédemption. Sans l'appel que nous fait le Christ ressuscité de mourir avec lui au péché pour ressusciter à la grâce avec lui, la rédemption serait inachevée, inutile. Car tel est le plan providentiel: la passion n'atteint sa pleine efficacité que dans la gloire.

Voilà pourquoi la piété des fidèles oscille sans cesse entre la rédemption et la résurrection, entre le Messie souffrant et le Messie glorieux, trouvant ainsi son équilibre. Tel est l'enseignement de la Bible, de la Liturgie, des Papes. Telle est aussi la spiritualité qui anime l'Intronisation.

par P. M. Bocquet
in "Horizons Blancs"

Pages : « Début   ‹ Précédente | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 |

Similar interests

Mentions légales - Contacter le webmaster - Accès privé